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Metalchroniques
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1 août 2006

Hard rock, heavy metal, metal : histoire, cultures et pratiquants de Fabien Hein

metal_heinIrma éditions, 2004, 319 p.

Ce livre est un ouvrage universitaire. Il a pour ambition d'analyser avec précision le milieu du metal, et pas seulement sur le plan musical, et de plonger dans la réalité des amateurs par l'intermédiaire d'une enquête en Lorraine. Le grand public n'y trouvera pas un style séduisant ou emphatique. Fabien Hein, au moment d'écrire cet essai, terminait un doctorat de sociologie à l'université de Metz. Seuls ceux d'entre vous qui étudiez les sciences sociales tout en écoutant du metal pourront vraiment aller au bout de l'ouvrage.

Si on ne peut contester la somme considérable de travail fournie par l'auteur, ce bouquin ne sera pas, loin de là, un incontournable du genre. D'abord, Fabien Hein est lui-même fan de metal, et pas qu'un peu : musicien (le groupe Carn, appremment du stoner, dont on ne trouve d'ailleurs aucune trace sur le net...), rédacteur dans moult fanzines, accro des concerts... C'est une règle essentielle de la sociologie qui est bafouée : la distance par rapport à son sujet d'analyse. Hein est tellement fan qu'il s'enferre consciencieusement dans une défense systématique de notre style favori. Mais non, les metalleux ne sont pas racistes, mais non le satanisme n'est pas une menace, mais point du tout les amateurs de metal ne sont pas des crétins, bien au contraire. Le tout avec deux facheuses manies :d 'abord la citation à tout va (le syndrome du néophyte : s'abriter derrière la production universitaire existante et plaire à ses professeurs) de sociologues ayant écrit non seulement sur la musique mais aussi sur l'art en général ; ensuite le jargonnage forcené, histoire de se convaincre de son propre sérieux. Comme si on ne pouvait écrire de façon précise et sérieuse sans abuser de termes abscons. Le tout pour bien souvent enfoncer des portes ouvertes (du genre "pas facile de sortir un album", ou encore "ouh là là quelle mauvaise réputation n'a-t-on pas, nous malheureux fans de metal").

Pour ces raisons, le livre s'avère d'une lecture assez pénible, que ce soit dans sa partie descriptive - dont 100 pages de dico détaillant les différents styles, du true metal au death gore- ou dans sa partie plus personnelle, une analyse du milieu metal en Lorraine autour de l'année 2000. Pour autant, l'expertise de l'auteur est incontestable : il connaît parfaitement le metal, ses genres, son histoire. Les bourdes et omissions sont tellement rares qu'il serait mesquin de les détailler ici. Pour autant, cette somme laborieuse est peu digeste.

Hein a ainsi interviewé plus de 150 amateurs de metal, la plupart jouant dans des groupes. Et il a tiré toutes les statistiques possibles de son échantillon : milieu social d'origine, budgets en tous genres, niveau d'étude... On se retrouve avec de nombreux tableaux peu pertinents, surtout lorsque l'auteur totalise des chiffres pour un oui ou pour un non (quel intérêt de savoir combien représente la valeur TOTALE du matos des trente groupes ?). Il aurait été bien plus intéressant de comparer ces réalités de musiciens amateurs avec des chiffres de l'industrie musicale : grands groupes, majors, tourneurs internationaux...

Fabien Hein a voulu en dire le maximum tout en revalorisant constamment le metal. Cet engagement est éminemment respectable, voire touchant. Le problème, c'est que ses lecteurs, outre quelques universitaires totalement étrangers à ce monde qui eux, auront l'impression de connaître le metal, ce seront des fans de metal eux-mêmes, curieux de découvrir un discours sérieux sur leur passion. Et ceux-là n'apprendront rien de nouveau, ni sur la musique, ni à propos de ses passionnés.

A noter : l'auteur fait paraître en septembre un nouveau livre : "rock et religion : dieu(x) et la musique du diable", cette fois-ci chez un éditeur grand public.

David Taugis

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Commentaires
B
Je n'ai rien à contester quant à la chronique du livre si ce n'est une remarque : il est d'autant plus fâcheux que l'auteur ait globalement raté sa cible en construisant son argumentation autour d'un descriptif en arborescence du metal. Etant donné la multiplicité des sous-genres, il est facile de s'y perdre et de perdre le lecteur. Par ailleurs beaucoup de ces sous-genre sont largement des labels commerciaux servant à des maisons de disque visant à créer des impressions de nouveauté factices. Ce choix de l'auteur est d'autant plus dommageable qu'il avait cerné très tôt, dès les premières pages de son livre, une problématique intéressante (et avortée) : la dynamique interne du heavy metal depuis sa naissance à la fin des années soixante se confond avec une radicalisation musicale et un recours de plus en plus marqué aux nouveautés techniques. Là il touche juste.
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